• Viens, accours, fille joile!
    Viens, que j'oublie en ton sein
    Le chagrin,
    Qui, partout, dans cette vie,
    Suit le pauvre pèlerin.

    Qu'un autre, envieux de la gloire
    Dans le tracas coule ses jours;
    Moi, toujours
    Riant de ce mot illusoire,
    Je n'ai que la soif des amours!

    Viens, accours, fille joile!
    Viens, que j'oublie en ton sein
    Le chagrin,
    Qui, partour, dans cette vie,
    Suit le pauvre pèlerin.

    Qu'un buveur, la tasse remplie,
    Aux coteaux consacre ses jours;
    Moi, toujours,
    Sans goût savourant l'ambroisie,
    Je n'ai que la soif des amours!

    Viens, accours, fille jolie!
    Vien, que j'oublie en ton sein
    Le chagrin
    Qui,partout, dans cette vie,
    Suit le pauvre pèlerin.

    Qu'un ladre, accumulant sans cesse,
    Sur ses trésors traîne ses jours;
    Moi, toujours,
    Méprisant honneur et richesse,
    Je n'ai que soif des amours!

    Viens, accours, fille joli!
    Vien, que j'oublie en ton sein
    Le chagrin,
    Qui, partout, dans cette vie
    Suit le pauvre pèlerin.

    Qu'un Anglais trace sur la tombe
    Des vers sombres comme ses jours;
    Moi, toujours
    Sur des fleurs ma lyre retombe;
    Je n'ai que soif des amours!

    Viens, accours, fille joli!
    Vien, que j'oublie en ton sein
    Le chagrin,
    Qui, partout, dans cette vie
    Suit le pauvre pèlerin.

    Le temps éteindra sous ses ailes
    Les feux ardents de mes beaux jours;
    Moi, toujours,
    Je serai galant près des belles;
    Je n'ai que soif des amours!
     
    Viens, accours, fille joli!
    Vien, que j'oublie en ton sein
    Le chagrin...


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  • Lorsque tu dormiras, ma belle ténébreuse,
    Au fond d'un monument construit en marbre noir,
    Et lorsque tu n'auras pour alcôve et manoir
    Qu'un caveau pluvieux et qu'une fosse creuse;

    Quand la pierre, opprimant ta poitrine peureuse
    Et tes flancs qu'assouplit un charmant nonchaloir,
    Empêchera ton coeur de battre et de vouloir,
    Et tes pieds de courir leur course aventureuse,

    Le tombeau, confident de mon rêve infini
    (Car le tombeau toujours comprendra le poète),
    Durant ces grandes nuits d'où le somme est banni,

    Te diras,: "Que vous sert, courtisane imparfaite,
    De n'avoir pas connu ce que pleurent les morts?"
    -Et le ver rongera ta peau comme un remords.


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  • J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans

    Un gros meuble à tiroirs encombrés de bilans,
    De vers, de billets doux, de procès, de romances,
    Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
    Cache moins de secrets que mon triste cerveau.
    C'est une pyramide, un immense caveau,
    Qui contient plus de morts que la fosse commune.
    -Je suis un cimetière abhorré de la lune,
    Où comme des remords se traînent de longs vers
    Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers.
    Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées,
    Où gît tout un fouillis de modes surannées,
    Où les pastels plaintifs et les pâles Boucher,
    Seuls, respirent l'odeur d'un flacon débouché.

    Rien n'égale en longueur les boiteuse journées,
    Quand sous les lourds flocons des neigeuses années
    L'enui, fruit de la morne incuriosité,
    Prend les proportions de l'immoralité.
    -Désormais tu n'es plus, ô matière vivante!
    Qu'un granit entouré d'une vague épouvante,
    Assoupi dans le fond d'un Sahara brumeux;
    Un vieux sphinx ignoré du monde insoucieux,
    Oublié sur la carte, et dont l'humeur farouche
    Ne chante qu'aux rayons du soleil qui se couche.


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  • Je ne vous ferai point de reproches frivoles:
    Les moments sont trop chers pour les perdre en paroles.
    Mes soins vous sont connus: en un mot, vous vivez,
    Et je ne vous dirais que ce que vous savez.
    Malgré tout mon amour, si je n'ai pu vous plaire,
    Je n'en murmure point; quoiqu'à ne vous rien taire,
    Ce même amour peut-être, et ces même bienfaits,
    Auraient dû suppléer à mes faibles attraits.
    Mais je m'étonne enfin que, pour reconnaissance,
    Vous ayez si longtemps, par des détours si bas,
    Feint un amour pour moi que vous ne sentiez pas.

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  • Oh! Quand la Mort, que rien ne saurait apaiser,
    Nous prendra tous les deux dans un dernier baiser
    Et jettera sur nous le manteau de ses ailes,
    Puissions-nous reposer sous deux pierres jumelles!
    Puissent les fleurs de rose aux parfums embaumés
    Sortir de nos deux corps qui se sont tant aimés,
    Et nos âmes fleurir ensemble, et sur nos tombes
    Se becqueter longtemps d'amoureuses colombes!

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