• La fontaine du cimetière (Théophile Gauthier)

    A la morne chartreuse, entre des murs de pierre,
    En place du jardin l'on voit un cimetière,
    Un cimetière nu comme un sillon fauché,
    Sans croix, sans monument, sans tertre qui se hausse:
    L'oubli couvre le nom, l'herbe couvre la fosse;
    La mère ignorerait où son fils est couché.

    Les végétations maladives du cloître
    Seules sur ce terrain peuvent germer et croître,
    Dans l'humidité froide à l'ombre des longs murs;
    Des morts abandonnés douces consolatrices,
    Les fleurs n'oseraient pas incliner leurs calices
    Sur le vague tombeau de ces dormeurs obscurs.

    Au milieu, deux cyprès à la noire verdure
    Profilent tristement leur silhouette dure,
    Longs soupirs de feuillage élancés vers les cieux,
    Pendant que du bassin d'une avare fontaine,
    Tombe en frange effilée une nappe incertaine,
    Comme des pleurs furtifs qui débordent des yeux.

    Par les saints ossements des vieux moines filtrée,
    L'eau coule à flots si claire dans la vasque éplorée,
    Que pour en boire un peu je m'approchai du bord...
    Dans le cristal glacé quand je trempai ma lèvre,
    Je me sentis saisi par un frisson de fièvre:
    Cette eau de diamant avait un goût de mort!


  • Commentaires

    1
    Mercredi 20 Septembre 2006 à 12:03
    dieu
    que ce texte est horrifiant et beau
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